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que, luthérienne et calviniste, avec l'égalité des droits entre elles. L'Espagne seule refusa d'accéder au traité. La diète de Ratisbonne (1654) mit le dernier sceau à la pacification de Munster. Ferdinand mourut en 1657.

Léopold, 1658. Le fils de Ferdinand continua l'alliance faite par son père avec la Pologne, le Danemark et le Brandebourg, contre la Suède. En 1664, il remporta une victoire éclatante sur les Turcs, à Saint-Gothard, en Hongrie. Les Hollandais ayant imploré le secours de l'Empire contre la France, Léopold s'allia avec eux par un traité (1672). Aussitôt, une armée française entre en Allemagne. Tandis que Condé fait tête, dans les Pays-Bas, au prince d'Orange, et que Louis XIV en personne envahit la Franche-Comté, Turenne lutte d'habileté avec Montecuculli; et il se croit au moment d'atteindre un résultat longtemps poursuivi, lorsqu'il est tué à Salzbach (1675). L'armée française repassa le Rhin; et le maréchal de Créqui, battu à Consarbruck, fut pris, dans Trèves, qui capitula malgré lui. Enfin la paix de Nimègue (1678) rendit la tranquillité à l'Europe. Cependant la France ne posa pas les armes ; et ce ne fut qu'en 1684, et grâce à la diversion opérée par les Turcs qui assiégeaient Vienne, qu'une trêve de vingt ans fut conclue entre les deux puissances. Mais elle fut rompue, en 1688, par l'accession de l'empereur à la ligne d'Augsbourg, formée en 1686, par le roi d'Espagne, le roi de Suède, la Hollande. La guerre recommença dans les Pays-Bas et en Italie, et partout la France fut victorieuse. Les hos. tilités ne cessèrent qu'à la paix de Ryswick (1695). Ce traité fut suivi du traité de Carlowitz, conclu (1699) avec les Turcs. Tous deux furent plus avantageux à Léopold qu'il ne semblait pouvoir l'espérer. La mort de Charles II, roi d'Espagne (1700) ralluma, la guerre en Europe. Le testament de ce prince appelait à la couronne Philippe, duc d'Anjou, petit-fils de Louis XIV; Léopold y prétendait, en vertu des pactes de famille. Il envoya en Italie le prince Eugène, qui battit les Français à Carpi et à Chiari, et fut battu lui-même à Luzzara (1702). Fort de l'alliance de la Hollande et de l'Angleterre, l'empereur donna le titre de roi d'Espagne (1703) à son deuxième fils, l'archiduc Charles. Le jeune prince alla débarquer à Lisbonne (1704), apportant avec lui la guerre, allumée déjà en Allemagne, en Italie et dans les Pays-Bas. Léopold mourut sur ces entrefaites.

Joseph Ies, 1705. — Joseph, fils aîné de Léopold, continua la guerre. Il mit au ban de l'Empire les électeurs de Cologne et de Bavière, qui s'étaient déclarés pour la France (1706), et les dépouilla de leur électorat. Au dehors, l'Allemagne étant délivrée, on songea à envahir

la France. Les deux défaites de Hildesheim et de Ramillies lui firent perdre la Flandre espagnole. Vendôme, rappelé d'Italie, où il avait battu le prince Eugène à Cassano, arrêta les progrès de Marlborough dans les Pays-Bas; mais son départ d'Italie fit perdre aux Français le Modénais, le Mantouan, le Milanais, le Piémont et le royaume de Naples. En Espagne, les provinces d'Aragon, de Catalogne et de Valence avaient reconnu l'archiduc Charles; les Français étaient réduits partout à se tenir sur la défensive. Villars fit une heureuse expédition en Souabe; mais, en 1708, les Français furent battus à Oudenarde, et Lille fut prise. Les alliés avaient réuni tous leurs efforts pour la campagne de 1709. Enfin, la bataille de Malplaquet, bien que Villars eût été forcé d'abandonner le champ de bataille, arrêta, dans la Flandre, les progrès de Marlborough et d'Eugène. En même temps, l'empereur, maître de la Lombardie, du royaume de Naples, de la Sardaigne, entreprenait de faire revivre les droits de l'Empire sur les grands fiefs d'Italie. Les républiques et les princes ne combattaient ses prétentions que par des écrits; le pape lui opposa une armée; mais, reconnaissant sa faiblesse, il fut bientôt obligé de subir les conditions de Joseph. Celui-ci faisait ainsi sentir partout sa puissance, et il eût porté loin la gloire de l'Empire, sans la petite vérole qui l'enleva en 1711.

Charles VI, 1711. — Charles, deuxième fils de l'empereur Léopold, reconnu roi d'Espagne par les alliés, était à Barcelonne, quand il apprit la mort de son frère Joseph; il se hâta d'accourir. Les alliés, qui craignaient de voir la couronne impériale réunie à celle d'Espagne, changèrent alors de système. Des négociations furent ouvertes entre la France et l'Angleterre, et le prince Eugène, réduit aux seules troupes de l'Empire, fut vaincu à Denain. Enfin, après avoir encore perdu Landau et Fribourg, Charles conclut avec la France le traité de Rastadt (1714).

L'Empire n'eut pas encore pour cela la paix. Le sultan Achmet III ayant déclaré la guerre aux Vénitiens, l'empereur la lui déclara à lui-même. Les Turcs, battus par le prince Eugène à Peterwaradin et à Belgrade, furent forcés de signer la paix de Passarowitz, qui donnait à l'empereur le bannat de Servie et une partie de la Valachie, de la Bosnie et de la Croatie. Attaqué par les Espagnols, qui s'étaient emparés de la Sardaigne et avaient fait une descente en Sicile, Charles VI envoya des troupes les combattre, en Italie. Mais Alberoni, ministre d'Espagne, ayant été disgracié (1719), la paix devint facile, et Philippe rentra lui-même dans la quadruple alliance que venaient de conclure l'empereur, la France l'Angleterre et la Hollande.

La paix étant établie, Charles s'occupa de bâtir sur de solides fondements la prospérité de l'Allemagne. Il songea aussi à l'avenir; et, le 25 octobre 1720, les états de Silésie reçurent la pragmatique sanction, par laquelle, à défaut d'enfants måles, il appelait à lui succéder ses filles, nièces, etc.

La mort de Frédéric-Auguste Ier avait laissé vacant le trône de Pologne. La cour de Vienne, d'accord en cela avec celle de Russie, voulut y placer le fils du roi défunt, au préjudice du roi Stanislas, que soutenait la France. Elle réussit; mais son succès l'entraîna dans une guerre sanglante contre les Français, guerre qui se termina par un traité très-peu avantageux pour l'empereur : il y perdit la Sardaigne et les royaumes de Naples et de Sicile; son gendre François y perdit les duchés de Lorraine et de Bar. Une autre guerre contre les Turcs (1737) ne fut pas plus heureuse le prince Eugène était mort l'année précédente, et ses successeurs n'avaient pas son habileté. Charles termina aussi cette guerre par un traité onéreux (1739). Il allait mettre la dernière main à la pragmatique sanction, en fai sant élire roi des Romains son gendre, le grand duc de Toscane, lorsqu'il mourut.

Charles VII, 1742. Charles VI mort, on ne tint nul compte de ses intentions; de tous côtés s'élevèrent des prétendants à son héritage; Charles, électeur de Bavière, aidé par la France, l'emporta sur Frédéric II, roi de Prusse, et sur Marie-Thérèse, fille de l'empereur défunt. S'étant rendu maître de Prague, il y fut proclamé roi de Bohême (1741). Il se rendit à Francfort, accompagné du maréchal de Belle-Isle, et il y fut élu et couronné empereur. Son règne ne dura que trois ans, et fut une guerre continuelle, dont il ne vit pas la fin.

Francois Ier, 1745. - François de Loraine, grand-duc de Toscane, époux de MarieThérèse, fut élu, grâce à elle, empereur, à Francfort, malgré l'opposition de Frédéric II et de l'électeur palatin. La tranquillité ayant été rendue à l'Europe par le traité d'Aix-laChapelle (1748), François s'efforça de rétablir l'harmonie parmi les membres du corps germanique. Mais s'il avait la couronne et le titre d'empereur, c'était Marie-Thérèse qui régnait. Elle haïssait Frédéric II, qui l'avait dépouillée de la Silésie; elle se ligua contre lui avec la France et la Russie, et la guerre de Sept ans commença. L'Autriche eut le dessous dans cette guerre, qui finit par le traité d'Hubertsbourg (1763).

Deux ans après, François 1er acheva son règne inutile comme empereur. Ce prince, bon et savant, ne joua jamais qu'un rôle secondaire, et ne fit qu'aider l'impératrice dans l'exécution des desseins qu'elle concevait.

Joseph II, 1765. — Marie-Thérèse ne laissa à son fils, proclamé empereur, qu'une autorité purement nominale, comme elle avait fait à son époux. Cependant elle se l'associa dans le gouvernement des États héréditaires de sa maison. Le règne de Joseph II ne fut marqué que par des réglements d'administration intérieure et de légères modifications dans la constitution de l'Empire. La seule guerre qu'il eut à soutenir fut contre le roi de Prusse et le duc de Deux-Ponts, électeur palatin, touchant la succession de Maximilien. Joseph, électeur de Bavière, mort sans postérité, en 1777. Les troupes, entrées en campagne, se contentèrent de s'observer réciproquement, et la querelle se termina par le traité de Teschen (1779). Le général Laudon fit aussi une expédition heureuse contre les Turcs, et leur prit Belgrade (1789). Joseph II mourut l'année suivante. Marie-Thérèse était morte depuis 1780.

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Léopold II, 1790. Léopold, frère de Joseph II, lui succéda. Il continua d'abord la guerre contre les Turcs; puis, la médiation de la Prusse et de l'Angleterre le força de conclure avec eux le traité de Reichenbach (1791). Ce traité lui garantissait la soumission du Brabant, soulevé contre l'Autriche; néanmoins l'insurrection des patriotes brabançons ne fut apaisée que par la force des armes, et elle ne le fut pas pour longtemps: la révolution française venait d'éclater; l'empereur conclut avec le roi de Prusse le traité de Pilnitz (1791), et il mourut presque subitement l'année suivante.

François II, 1792, Le fils de Léopold lui succéda. Il fut proclamé, le 11 août 1804, empereur héréditaire d'Autriche, et deux ans après (6 août 1806), il renonça à la dignité impériale d'Allemagne.

Geor. Henr. Pertz, Monumenta Germaniæ historica ab anno Christi 500 ad annum 1500... Hanov. 1826-42, 2 vol. in-fol.

Pfeffel, Nouvel Abrégé chronologique de l'histoire et du droit public d'Allemagne, Paris, 1776, 2 v. in-4°. Schmidt, Histoire des Allemands, trad, en français par J. C. de Laveaux, Liége, 1784-87, 5 vol. in-8°. K. A. Menzel, Geschichte der Deutschen, Breslau, 1815-22, 8 vol. in-4°.

H. Luden, Geschichte der deutschen Volks, Gotha, 1825-37, 12 v. in-8°.

J. G. Pfister, Histoire de l'Allemagne, d'après les sources, depuis les temps les plus reculés jusqu'à nos jours, trad. en français par M. Paquis, Paris, 1835-38, 11 vol. in-8°.

Le Bas, l'Allemagne, faisant partie de l'Univers pittoresque, Paris, 1842, 3 vol. in-8°.

Fr. de Raumer, Geschichte der Hohenstaufen und ihrer Zeit, Leipz. 1823-25, 6 vol. in-8°.

Furst. E. M. Lichnowsky, Geschichte des Hauses Habsburg, Wien, 1840, 4 vol. in-8°.

W. Coxe, The history of house of Austria, Lond. 1807, 4 vol. in-4°.

L'Art de vérifier les dates, édition in-8°, tre partie après J.-C., t. VII, p. 275, et suiv.

S.-A. CHOLER.

ALLEMAGNE (Langue de l'). La langue allemande a longtemps été considérée, du moins sous sa forme la plus ancienne, comme une langue radicale et indépendante de toute dérivation étrangère. Cependant les travaux modernes des Allemands eux-mêmes, ceux notamment d'Othmar Frank, de Dorn et de Hammer, ont démontré ses rapports, non-seulement avec le grec, mais encore avec le sanskrit et le persan. Elle forme la branche moderne la plus intéressante de la grande famille des langues indo-germaniques, et peut être considérée comme la sœur aînée, sinon comme la mère, du flamand, du. hollandais, du danois, du suédois et de l'anglais.

Nous n'avons point à traiter ici une question ethnographique : nous dirons seulement que, bien que la plupart des auteurs voient dans l'existence de tant de racines communes à l'allemand et aux idiomes de l'Asie méridionale, la preuve d'une origine asiatique, quelquesuns, et de ce nombre Adelung et Morhof, ne veulent voir dans le même fait que le résultat des migrations partielles de la race teutone ou gothique, qui aurait au contraire laissé ces traces de sa propre langue, ici en Grèce, là dans l'Inde et dans la Perse.

Dès les temps les plus reculés, la langue germanique s'est trouvée divisée en idiome du sud ou de la haute Allemagne (Ober-Deutsch) et en idiome du nord ou de la basse Allemagne (Nieder-Deutsch). Le premier monument écrit que l'on connaisse de cette langue paraît se rattacher par ses formes à l'idiome du sud; c'est la traduction de la Bible, faite, vers l'an 360, par Ulphilas, évêque des Goths de Mésie. Ce livre, qui encore ne nous est pas parvenu complet, est tout ce que nous possédons dans la langue gothique. On attribue en même temps à son auteur l'invention des caractères à formes anguleuses usités depuis dans la transcription des idiomes germaniques.

Le dialecte que parlaient les Francs est rangé par quelques auteurs avec l'idiome du sud, par d'autres, avec celui du nord; d'autres, enfin, l'ont considéré comme un intermédiaire entre les deux. L'allemand des Francs ou francique ne commença à s'écrire qu'au septième siècle. C'est de ce dialecte que Charlemagne fit rédiger ou même, selon quelques-uns, rédigea lui-même une grammaire. Ce livre est aujourd'hui perdu, et il en est de même de la traduction de la Bible faite en cette langue par l'ordre de l'empereur Louis Ier. L'idiome du nord prévalut sous les empereurs saxons; mais, après l'avénement de la maison de Hohenstaufen, une nouvelle branche de l'idiome de la haute Allemagne, le dialecte de Souabe, que l'on nommait Alémannique, devint la langue de l'Empire, et de cette époque date sa prépondé

rance sur l'allemand du nord. Sous Othon IV, au douzième siècle, il commença à être employé dans les diètes et dans les actes publics. Il forme la base de la langue moderne, et l'on peut dire même qu'il subsiste encore, jusqu'à un certain point avec son caractère primitif, en Alsace et en Suisse.

La fusion de l'allemand du midi et de celui du nord dans les provinces du centre a donné naissance à l'allemand moyen (MittelDeutsch). Parmi les variétés assez nombreuses que présentait ce dernier idiome, comme chacun des autres du reste, il faut distinguer le dialecte qui était alors particulier à la haute Saxe et qui fut celui dont se servit Luther. Le réformateur le fixa en traduisant avec un rare bonheur la totalité des livres de la Bible. Ainsi fixé, ce dialecte devint ce que l'on a nommé le haut allemand (Hoch-Deutsch) pour le distinguer de l'idiome plus grossier de la basse Saxe, que l'on désignait du nom de bas allemand (Platt-Deutsch).

Le bas allemand a aujourd'hui complétement cessé d'être cultivé comme langue littéraire, et il n'est guère parlé qu'à l'état de patois par les basses classes en Westphalie, dans le Mecklembourg et le Holstein ainsi qu'en Poméranie. Comme l'office dans les églises et l'enseignement dans les écoles n'ont lieu qu'en haut allemand, les paysans comprennent partout cette dernière langue, tout en employant encore de préférence l'autre entre eux.

A l'époque de Luther, le latin était redevenu, à l'exclusion de la langue nationale, la langue du législateur, du jurisconsulte, du savant. Le haut allemand qui, depuis l'impulsion que lui donna le réformateur, s'est encore considérablement perfectionné, n'est plus aujourd'hui l'idiome particulier d'un territoire distinct; c'est la seule langue que parlent et écrivent comme langue nationale les gens instruits de toutes les parties de l'Allemagne. C'est dans toute la haute Saxe et dans une partie de la basse, en Hanovre et sur les bords du Necker et du Mayn que le peuple la parle avec le plus grand degré de pureté. Sa prononciation dans ces provinces n'a rien de cette antique rudesse du teuton qui choquait si fort les Romains, que, selon Mela, une bouche italienne n'en aurait pu émettre les sons. Dans la haute Souabe, sur les bords du haut Rhin, dans la haute Bavière et en Autriche on trouve toujours, il est vrai, ces voyelles dures, ces consonnes sifflantes, ces fortes aspirations qui donnaient encore à Voltaire tant d'éloignement pour la langue des Welches; mais dans la basse Allemagne, au contraire, les consonnes sont en général molles, les voyelles longues et traînantes. Quelles que soient, du reste, ces nuances locales de prononciation, l'accent prosodique tombe partout su les syllabes radicales.

On ne peut nier du reste que, si l'on compare l'allemand à l'italien ou même au français, le retour fréquent des consonnes dans la première de ces langues, où cette classe de lettres termine presque toutes les syllabes, ne lui donne une sorte de dureté. L'effet en est d'autant plus sensible pour une oreille étrangère, qu'elle y est souvent frappée d'une articulation aspirée particulière (le ch), inconnue dans les idiomes de l'Europe occidentale, bien qu'elle ait ses analogues dans le ỵ des Grecs et le x des Russes.

Les autres langues de l'Europe ont emprunté à l'allemand les termes relatifs à une foule d'arts, au travail des mines, à la chasse, etc. L'allemand de son côté était, au siècle de la réforme, mêlé de quelques mots italiens et même espagnols qui s'y étaient glissés récemment par l'influence de la cour impériale et des étrangers qui y étaient attachés. Lors de la guerre de trente ans, l'occupation de tant de points du territoire par des armées étrangères exerça aussi une influence sur la langue, « et on voit les actes de l'Empire de ce temps, dit Gottsched dans ses Réflexions sur les réfor· mes à faire dans la langue allemande, remplis de mots que nos aïeux auraient démentis. » Après le traité des Pyrénées, on sentit s'introduire en Allemagne avec l'influence de la politique de la France, celle de sa langue. Une foule de mots et de tournures françaises, malgré la différence du génie des deux idiomes, passèrent dans l'allemand. Le français finit même par remplacer la langue nationale dans les cercles de la haute société. L'allemand y a depuis repris sa place naturelle; mais le langage familier a conservé un certain nombre de inots français.

De toutes les langues de l'Europe, l'allemand est assurément celle qui pourrait le plus facilement se passer de semblables emprunts. Aucune, en effet, n'est aussi riche, puisqu'au moyen de nouvelles combinaisons de ses racines, son vocabulaire est susceptible de s'étendre, pour ainsi dire, indéfiniment. Elle doit à l'abondance et à la souplesse de ses éléments l'avantage d'être plus que toute autre exempte de ces idiotismes, si communs en français et en anglais, qui, dans le sens général de la composition qu'ils forment, semblent n'avoir conservé rien de commun avec la valeur des termes qui les composent. L'allemand convient bien aux sujets scientifiques, surtout à la philosophie, et se plie facilement à embrasser dans une même période une longue série d'idées qui se lient entre elles. Il est vrai que parfois les prosateurs abusent singulièrement de la facilité que leur offre sous ce rapport le génie de leur idiome et fatiguent le lecteur par des périodes qui forment un véritable labyrinthe grammatical. Mais le pittoresque des

expressions, la hardiesse et l'indépendance des constructions rendent l'allemand éminemment propre à la poésie, et c'est quelque chose de bien remarquable que la manière dont il se prête à reproduire les poëtes étrangers, ceux de la Grèce surtout, en se pliant sans effort à la mesure des vers de l'original et en les traduisant à peu près mot à mot.

La langue allemande a, comme le grec, trois genres; mais la répartition des substantifs entre le masculin, le féminin et le neutre, n'y semble pas susceptible d'une explication logique, puisque le neutre appartient souvent à des noms désignant des êtres dont le sexe est connu et que des noms d'objets inanimés sont souvent affectés du masculin ou du féminin

Les noms allemands se déclinent; mais ils n'ont pas la richesse des désinences du grec ou du latin. On ne peut, en effet, y distinguer par leur terminaison plus de trois cas au singulier et de deux au pluriel. La déclinaison des articles, bien plus complète, supplée à l'insuffisance de celle des substantifs. Une particularité remarquable que présente l'adjectif, c'est que, susceptible d'accord quand il accompagne un substantif comme simple qualificatif, il reste invariable quand il forme l'attribut d'une proposition.

Le verbe allemand n'a qu'une seule conjugaison et que deux temps simples, le présent et l'imparfait; le parfait et le plus-que-parfait, les deux futurs et les deux temps du conditionnel se forment comme tous les temps du passif à l'aide d'auxiliaires. Une particularité qui, selon Adelung, ne se retrouve, ailleurs, que dans quelques idiomes du sud de l'Asie, c'est que la politesse fait employer, pour désigner la personne à laquelle on adresse la parole, non pas, comme en français, la seconde personne du pluriel, mais la troisième. L'inversion est le caractère de la construction allemande : l'adjectif y précède constamment le substantif qu'il qualifie, et le verbe principal est généralement rejeté à la fin de la période ; enfin les adverbes prépositifs qui peuvent se séparer des verbes dont ils font cépendant partie intégrante, donnent à la phrase une allure particulière pleine de grâce.

Cet idiome, véritable lien commun de toutes les parties de l'Allemagne (1), se parle encore,

(1) La langue allemande tend continuellement à s'étendre; elle soutient une lutte opiniâtre contre les langues slaves, qu'elle refoule sans cesse. Dans la Prusse orientale et occidentale, où l'élément slave était dominant, ainsi qu'en Silésie, l'allemand fait tous les jours des progrès. La Bohême, divisée en seize cercles, n'a conservé son ancienne langue que dans trois ou quatre. La Moravie subit une influence semblable. Dans une grande partie de la Pologne l'allemand subsiste à côté du polonais, ou bien l'a remplacé complétement. En Russie, toutes les villes sur la Baltique ont adopté la langue allemande, et tout Russe bien élevé la parle, même à Moscou L'in

en France dans l'Alsace et dans une partie des départements voisins, en Suisse dans le plus grand nombre des cantons, en Danemark dans les duchés de Holstein et de Sleswig, et en Russie dans les gouvernements de Finlande, d'Esthonie et de Courlande.

La première grammaire allemande que l'on connaisse a été composée vers 1534, par Valentin Ickelsamer, sous le titre de Teutsche grammatica.

Les principaux traités tant grammaticaux que lexicographiques publiés en Allemagne depuis cette épo que sont les suivants :

Ge. Henischii Thesaurus linguæ et sapientiæ germanic, 1616. in-fol.

Mart. Opitz. Prosodia germanica, Brieg, 1624. in-4.

D. Geo. Morhof. Unterricht von der deutschen Sprache und Poesie, Kiel, 1682.

Jo. Ch. Gottsched. Grundlegung einer deutschen Sprachkunst, Leipzig, 1748.

Fried. Carl. Fulda Grundregeln der deutschen Sprache, Stuttgard, 1778, in-8°.

Jo. Ch. Adelung. Deutsche Sprachlehre, Berlin, 1781.

El. Casp. Reichard. Versuch einer Historie der deutschen Sprachkunst, Hambourg, 1747.

Adelung. Versuch eines vollstandigen grammatisch-Kritischen Voerterbuchs der hochdeutschen Mundart, 4 vol. in-8°, Leipzig, 1773-1802.

Joach. Heinr. Campe. Proben einer Versuche teutscher Sprachbereichung, Braunschweig, 1791. T. G. Voigtel. Versuch eines hochdeutschen Handwoerterbuchs, 3 vol. in-8°, Halle, 1793.

C. Phil. Moritz. Grammatisches Voerterbuch der deutschen Sprache, 4 vol., Berlin, 1793-1800.

Jo. Aug. Eberhards et J. G. Mauss. Versuch eine allgemeinen teutschen Synonimik, 6 vol. in-6. Halle, 1795-1802.

Campe.Woerterbuch der deutschen Sprache nebst dem Voerterbuch zur Erklaerung der unserer Sprache aufgedrungenen fremdem Woerte, 6 vol. in-4°, Braunschweig, 1807-1813.

Th. Heinsius. Volkstumliches Woerterbuch der deutschen Sprache. 4 vol. in-8°, Hanover.

Id. Geschichte der Sprach-dicht und Redekunst der Deutschen., Berlin, 4e édit., 1829.

Jacob Grimm. Deutsche Grammatik, Goettingue, 1822-1837, 4 vol. in-8°.

Heinrich Bauer. Vollstandige Grammatik der neuhochdeutschen Sprache, 5 vol. in-8°, Berlin, 1827

1833.

E. G. Graff et H. F. Massman. Althochdeutscher Sprachschatz oder Worterbuch der althochdeutschen Sprache, 6 vol. in-4o, Berlin, 1834-1843.

Les grammaires allemandes écrites en français qui ont été le plus suivies sont, dans l'ordre de leur

date, celles de Gottsched, de l'abbé Mozin, dejMeidinger, de Simon, de Hermann, et enfin le Cours complet de langue allemande de MM. Le Bas et Régnier.

Nous citerons enfin avec le Dictionnaire dit des deux nations, dont la première édition est de 1762, ceux de l'abbé Mozin, de M. Henschell, de MM. Schus

fluence autrichienne lui a fait prendre pied dans la partie septentrionale du royaume lombard-vénitien et dans presque toute la Hongrie et la Transylvanie. En Hollande et en Belgique, en Suède, en Norwége,

ter et Régnier, et l'excellent Dictionnaire de poche que l'on doit à l'auteur de l'article suivant. LÉON VAÏSSE.

ALLEMAGNE (Littérature de l'). La litté rature allemande, considérée comme l'expression de la vie intellectuelle, sociale et politique des Allemands, offre un tableau du plus haut intérêt. Éloignée de toute tendance exclusive, elle a accueilli tout ce qu'il y a de grand et de beau chez les autres peuples, sans perdre cependant ce cachet d'originalité et de nationalité qui fait le principal charme d'une littérature. Toutes les idées qui ont agité le monde intellectuel y sont examinées avec cet esprit philosophique, ce calme et cette persévérance germaniques qui, chez nous, sont presque passés en proverbe ; ce que Herder, en son particulier, a fait pour l'histoire, la littérature allemande, prise dans son ensemble, l'a fait pour toutes les productions de l'esprit humain.

Cependant cet esprit de spéculation critique et philosophique, joint au fractionnement politique, a jusqu'à présent empêché l'Allemagne d'exercer une puissante influence au dehors. Placée au centre de l'Europe, elle s'est toujours contentée du rôle de médiatrice, et semble être appelée à maintenir la paix et l'équilibre littéraires dans le monde, plutôt qu'à lui imposer ses lois. La littérature allemande, par suite de ce caractère particulier, a une tendance naturelle à l'éclectisme, et A. W. de Schlegel a tout à fait méconnu l'esprit dont elle est animée, lorsqu'il a dit qu'elle n'est qu'un amas confus de livres complétement dépourvus de tendance nationale; ce qui la distingue de toutes les autres, c'est précisément cette absence de tendances exclusives, c'est cet esprit de conciliation et de rectification dont nous venons de parler; en un mot, c'est cette universalité, dont Goethe est le plus beau modèle.

L'histoire de la littérature allemande, se divise ordinairement en sept périodes, ainsi qu'il suit :

1o Période gothique, depuis les temps les plus reculés jusqu'à Charlemagne (768) ; 2o Période franque, de Charlemagne à l'avé nement des Hohenstaufen (768-1137); 3° Période souabe (ou des Minnesaenger), des Hohenstaufen à l'origine des univer. sités allemandes ( 1137-1346);

en Danemark, l'allemand compte de nombreux parti- 4o Période rhénane (ou des Meistersaenger),

sans. Presque tous les trônes de l'Europe sont aujourd'hui occupés par des princes d'origine allemande; de sorte que cette langue pourrait bien, dans la suite des temps, parvenir à cette universalité dont la langue française a joui jusqu'à présent. Cette dernière, en effet, n'a gagné du terrain qu'en Lorraine et en Alsace, où toute la jeune génération est élevée dans l'usage de la langue qui est celle de la majorité de la France. En résumé; le français se parle, presque partout, dans la haute société; l'allemand a pénétré dans les nations mêmes.

A.

de l'origine des universités à la réforme (1346-1523);

5° Période saxonne, de l'école de Luther à

celle d'Opitz (1523—1625);

6° Période silésienne et suisse, de l'école d'Opitz à celle de Klopstock (1625-1760); 7° Période nationale, de Klopstock jusqu'à nos jours (1760-1845).

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