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par le Oued el-Haracth, renferme, en commençant par l'ouest, les établissements suivants, qui n'existent que depuis quelques années ce sont le camp et le village de DelhiIbrahim, le camp de Byr-Kadem, celui de Moustapha-Pacha, le village de Kouba, la Ferme Modèle, et enfin la Maison-Carrée, au delà de l'Haracth. En pénétrant dans le Sahel, et sur la route de Blidah, l'on rencontre le camp de Doueira; puis, plus loin, dans la Mitidja le camp et le village de Bouffarik.

La population de l'Algérie se répartit dans deux grandes classes, complétement distinctes par leurs mœurs, leurs habitudes, leur condition sociale, leur costume : l'une habite les villes, l'autre est disséminée dans les campagnes. La première se compose de cinq éléments principaux les Turcs, les Koulouglis, les Maures, les Juifs et les Nègres; la seconde ne comprend que les Arabes et les Berbers ou Kabayles, comme on les nomme aujourd'hui.

Les Kabayles sont les peuples autochthones de l'Afrique septentrionale; leurs tribus indépendantes représentent les Numides, premiers habitants du pays. Cependant, il est à présumer que chacune des invasions qui se succédèrent sur le sol africain vint augmenter le nombre des peuplades berbères, et compliquer les éléments qui les composaient; car les anciens usurpateurs du sol durent faire cause commune avec elles pour s'opposer aux progrès des nouveaux conquérants. On peut donc, en réalité, considérer les Kabayles comme un mélange de toutes les races dont le caractère indépendant a résisté aux diverses invasions. Leur organisation physique, selon M. Pélissier (Annales algériennes), se prête, du reste, à cette supposition, car ils n'ont pas de type bien déterminé : les traits caractéristiques du Midi s'y trouvent à côté de ceux des races du nord. Il existe même une tribu qui, par tra dition, a conservé le souvenir d'une origine européenne.

Les Kabayles sont répandus sur tout le sol de la régence; mais, plus nombreux que partout ailleurs aux environs de Bougie, dans ces montagnes où les chaînes de l'Atlas, plus rapprochées, ont offert un asile plus sûr aux descendants des anciennes populations, ils forment un corps de nation que ni les Arabes ni les Turcs n'ont pu entamer. Laborieux et adroits, ils s'adonnent à la culture de l'olivier; ils élèvent des bestiaux, des chevaux, des ânes; ils récoltent du miel et de la cire. C'est à eux seuls qu'on doit l'exploitation du petit nombre de mines mises en rapport dans la régence; ce sont eux qui fabriquent les armes qui ne sont point apportées de l'Europe ou du Levant; c'est enfin chez eux que se fait presque toute la poudre qui se consomme dans le pays.

Les Arabes, pour la plus grande partie, descendent des conquérants de l'Afrique au septième siècle; ils occupent les plaines, et plus les lieux qu'ils habitent sont éloignés de la mer, mieux ils ont conservé la pureté de leur type originel. Parmi les tribus arabes, les unes s'adonnent à la culture de la terre, et sont sédentaires ou à peu près; d'autres se livrent à l'éducation des troupeaux, vivent sous la tente, et mènent une vie nomade; ces dernières portent plus particulièrement le nom de Bédouins. Celles de ces tribus qui habitent l'Atlas et les confins du désert s'enrichissent par le commerce qu'elles font avec l'intérieur de l'Afrique, d'une part, et les États de Tunis et de Maroc, de l'autre ; elles habitent, en général, sous des tentes dont la réunion forme des douars. Ces tentes, en tissu de peau de chameau noir et brun, sont disposées en cercle, de manière à laisser dans le centre un grand espace vide, où les troupeaux sont enfermés la nuit. Les chevaux sont entravés avec des cordes tendues auprès de chaque tente; les armes et les selles sont toujours prêtes et sous la main, de sorte qu'en cas d'alerte, tout le douar peut être à cheval en moins de cinq minutes.

Chez les Arabes cultivateurs, dans la plaine de la Mitidja, par exemple, on rencontre d'assez beaux villages, appelés djemaa ; quelques-unes des habitations sont en pierre; les autres, nommées gourbis, sont en torchis. Un haouhh est moins considérable qu'un djemaa. Toutes ces réunions d'habitations, bien situées en général, sont entourées de jardins et de beaux arbres qui en rendent le séjour agréable.

La différence de rang est marquée chez les Arabes les guerriers et les marabouts forment, dans chaque tribu, l'ordre des grands; mais, quoique l'illustration de la naissance soit d'un grand poids, la grandesse est ouverte à quiconque a un cheval, de bonnes armes, et le courage de s'en servir.

Les marabouts sont des hommes qui, se consacrant entièrement à Dieu, se distinguent par la pratique des vertus et des bonnes œuvres; en dehors de toute hiérarchie sacer. dotale, ce sont des saints vivants, placés par l'opinion, entre les hommes et les anges. Les marabouts morts en odeur de sainteté sont ensevelis en grande pompe; on élève sur leurs tombeaux de petites chapelles, quelquefois même des mosquées, où les croyants se rendent en pèlerinage.

elle

La qualité de marabout est indélébile; se transmet de père en fils; mais chaque génération doit acheter, par les mêmes vertus et par la même piété, l'influence religieuse qui s'attache à ce titre.

Les arts et les sciences ont complétement

disparu chez les Arabes; à peine retrouve-t-on quelques traces d'instruction scientifique chez les marabouts du premier rang et chez les hommes de loi; mais l'instruction élémentaire est répandue, et il n'est pas de douar ou de village qui ne renferme une école de lecture et d'écriture. Ce peuple a, du reste, une grande aptitude aux travaux intellectuels, et il s'y livrerait avec succès si la carrière lui en était ouverte.

Chacune des tribus arabes, dont le nom se compose assez généralement du mot oulad ou beni (enfants ou fils), et d'un nom propre (Beni-Semilim, Oulad-Maadi, par exemple), est gouvernée patriarcalement par un cheyk ou chef, recommandable par sa naissance ou par ses talents. Complétement indépendantes les unes des autres, ces tribus se font fréquemment la guerre pour les sujets les plus légers, lorsqu'elles ne sont pas maintenues par un gouvernement ferme, ou réunies contre un ennemi commun; mais ces guerres sont peu sanglantes et de courte durée; elles se réduisent à quelques courses, à des surprises nommées razzia, dans lesquelles l'on pille les villages et les douars et l'on emmène les troupeaux.

Les Arabes combattent le plus souvent à cheval; ils sont armés d'un long fusil, dont ils se servent avec une adresse merveilleuse, d'un ou deux pistolets logés dans une sorte de ceinture, et d'un yatagan, sabre ou coutelas avec lequel ils tranchent la tête de leurs ennemis. Leur manière de combattre s'est modifiée depuis qu'ils ont les Français en tête, et surtout depuis l'organisation des corps réguliers d'Abd-el-Kader. Cependant, il est rare qu'ils attendent notre choc; ils se dispersent à l'approche de nos colonnes, pour revenir ensuite les harceler dans leurs mouvements de retraite, Cette tactique, qui | est, du reste, la meilleure pour eux, leur a quelquefois parfaitement réussi. Afin de pouvoir rendre les derniers devoirs à leurs morts, ou plutôt afin d'en prévenir la mutilation, et en même temps pour dissimuler leurs pertes l'ennemi, les cavaliers arabes sont tous munis d'une corde en poil de chameau, au moyen de laquelle ils entraînent les cadavres au galop. Quelquefois ces cordes leur servent d'armes offensives, comme les lazos des Gaunchos de Buenos-Ayres.

La population des villes se compose, avonsnous dit, de Turcs, de Koulouglis, de Mau-res, de Juifs et de Nègres.

Toujours peu nombreux depuis qu'ils se rendirent maîtres du pays au seizième siècle, les Turcs se composaient de descendants des compagnons de Barberousse, d'esclaves recrutés en Turquie et rendus à la liberté, enfin, de renégats chrétiens (et c'était le plus

grand nombre), qui, dès qu'ils embrassaient l'islamisme, jouissaient des mêmes priviléges et de la même considération que les Turcs.

Tous les Turcs étaient soldats, et chacun d'eux pouvait prétendre à la dignité de dey; aussi était-il rare de voir s'écouler quelques années sans que le chef de l'État fût renversé violemment. Le gouvernement était despotique; le dey avait droit de vie et de mort sur tous ses sujets mais ce pouvoir absolu était, comme on le voit, tempéré par la révolte et l'assassinat. Cependant, dans le principe, un conseil supérieur, ou divan, avait la haute direction gouvernementale et le pouvoir législatif; c'était même à ce divan qu'appartenait l'élection des deys. Malgré cette institution, l'élection, au lieu d'être le résultat d'une paisible délibération du divan, n'était le plus souvent que le produit d'une émeute soldatesque. Sous le dernier dey, le pouvoir du divan n'existait plus que de nom.

Le dey avait un certain nombre de ministres, chargés des différentes branches de l'administration. Mais, comme l'action de son gouvernement ne pouvait s'étendre directement sur les points éloignés, des gouverneurs, avec le titre de beys, exerçaient le pouvoir en son nom dans les différentes provinces. Les beys, au nombre de trois (ceux d'Oran, de Titery, de Constantine), devaient venir, tous les trois ans, à Alger, rendre compte de leur administration. Leur pouvoir était du reste aussi étendu dans leurs provinces que celui du dey à Alger pourvu qu'ils envoyassent, tous les six mois, à leur souverain, la moitié du tribut qu'ils étaient obligés de payer chaque année, ils pouvaient administrer le pays comme ils l'entendaient; ils établissaient les impôts suivant leurs caprices, et allaient les percevoir à la tête de leurs troupes, quand les kaïds, chargés de le faire, n'en pouvaient venir à bout.

En cas de guerre, chaque hey était obligé de se rendre aux ordres du dey, avec un nombre de troupes fixé; et avec toutes celles qu'il pouvait réunir, quand il s'agissait de la défense du pays contre une puissance européenne. Lorsque les Français débarquèrent en Afrique, les forces des trois beylicks, réunies à celles d'Alger, formaient une armée de vingtcinq à trente mille hommes.

La milice turque était divisée en compagnies ou odas, commandées par des officiers supérieurs, ayant sous leurs ordres des officiers subalternes.

Le dey et les beys avaient toujours près d'eux un certain nombre de soldats turcs qui formaient leur garde; ces janissaires, car c'est ainsi qu'on les appelait, jouissaient de certains priviléges et d'une grande considération.

Les Koulouglis, issus du mariage des Turcs avec les femmes maures, étaient admis dans la milice, mais sans pouvoir arriver aux grades supérieurs. Ils avaient été, jusqu'au commencement du dix-septième siècle, traités sur le même pied que les Turcs; mais ayant conspiré pour chasser ces derniers du pays, et leur complot ayant été découvert, ils furent exclus de tous les emplois de quelque impor tance, et soumis à une rigoureuse surveillance. On en vit cependant encore quelques-uns s'élever aux plus hauts postes : le dernier bey de Constantine, Achmet, était un Koulougli.

Les forces militaires du gouvernement algé rien ne se bornaient point à la milice turque; chacune des tribus arabes qui lui étaient soumises entretenait un certain nombre de cavaliers à sa disposition.

La marine algérienne, si longtemps redoutable, était, lorsque Alger tomba entre les mains des Français, réduite à trois frégates, dont une en chantier, et à quelques bâtiments légers.

Les Maures habitent les villes et les villages qui en sont voisins. Quelle est leur origine? C'est ce qu'il est difficile d'établir. Nous avons vu qu'on appela ainsi les premiers habitants connus de la partie occidentale de la Barbarie; ils conservèrent ce nom sous les Romains, ainsi que l'indique celui de Mauritanie, donné à leur pays. Quand les Arabes eurent conquis l'Afrique, ils s'établirent peu dans les villes, d'où leurs mœurs les éloignaient; les Maures, au contraire, s'y concentrèrent, par cela même qu'ils ne devaient point y rencontrer leurs vainqueurs. De là, sans doute, l'habitude de donner le nom de Maures à tous les habitants des villes, quoiqu'à la longue bien des familles arabes aient dû se, mêler à eux. Il est à remarquer que les Arabes, après avoir conquis l'Espagne, reçurent des chrétiens le nom de Maures, qu'ils conservèrent, et que ce fut sous ce nom qu'expulsés de l'Espagne, ils revinrent habiter la terre de leurs pères.

Traités avec dédain par les Turcs, les Maures sont mal vus des Arabes, qui les regardent comme peu supérieurs aux Juifs. Ils s'adonnent surtout au commerce.

Les Juifs, aussi nombreux que les Turcs et les Koulouglis, font remonter leur arrivée en Afrique à l'époque de la destruction de Jérusalem par Titus; mais il est probable que la plupart d'entre eux s'y réfugièrent quand ils furent expulsés d'Europe, au treizième siècle. Du reste, ils n'ont point eu plus à se louer de l'hospitalité des deys que de la tolérance des anciens rois chrétiens. Méprisés par les Turcs, les Maures et les Arabes, ils étaient encore forcés, dans ces derniers temps, comme en France au moyen âge, de se distin

guer des autres races par une marque extérieure: ils ne pouvaient porter que des vêtements noirs; leurs moindres fautes contre le gouver nement étaient punies du dernier supplice. A Alger, avant la conquête, un quartier de la ville leur était assigné; il leur était défendu, comme il l'est encore à Rome, d'habiter ailleurs. Les Juifs formaient cependant la portion la plus industrieuse de la population des villes; ils exerçaient la plupart des arts mécaniques; mais, comme partout ailleurs, ils préféraient le métier de brocanteurs, de revendeurs ; quelques maisons juives se livraient cependant au haut commerce, et avaient acquis de grandes richesses. Il est inutile de dire que la révolution qui renversa la domination turque fut accueillie avec joie par la population juive, qui vit, dans cet événement, le signal de son émancipation.

Les Nègres sont des esclaves qui, ayant recouvré leur liberté, se sont fixés dans le pays; ils sont généralement maçons, portefaix, bouchers, etc.

Outre la population essentiellement citadine, dont nous venons de parler, les villes, et surtout Alger, renferment une population mobile qu'on peut comparer à nos Auvergnals et à nos Limousins; ce sont les Berbères de BeniMozab et les Biskris du Zab, parmi lesquels se recrutent les domestiques, les portefaix, les porteurs d'eau; on y trouve aussi un grand nombre de Kabayles et d'Arabes, nommés medeny (citadins), qui exercent la plupart des métiers. Chacune de ces races forme une corporation régie par des statuts particuliers.

Depuis la conquête, une nouvelle population est venue se joindre aux éléments déjà si variés de l'ancienne. Au 30 septembre 1843, le nombre des Européens établis en Algérie était de 58,444, et depuis il s'est encore accru. Mais cette nouvelle population présente ellemême des éléments distincts: ainsi à Alger, les Français sont les plus nombreux ; à Bône, les Anglais et les Maltais sont en majorité; à Oran, ce sont les Espagnols. La situation de ces deux dernières localités suffit pour expliquer ce double résultat.

La religion mahométane, dominante dans toute l'étendue de la régence, y est divisée en plusieurs sectes les Turcs et les Koulouglis sont sunnites, c'est-à-dire orthodoxes; les Arabes, les Berbères, les Mozabites, s'éloignent plus ou moins de cette orthodoxie. Bien que les Arabes aient une foi vive, bien qu'ils soient sincèrement attachés à leur croyance, les idées de tolérance ne leur sont point étrangères; ils respectent tout acte religieux, quel que soit d'ailleurs le culte de celui qui s'y livre, mais ils ne comprennent pas l'absence de toute idée religieuse. M. Pélissier raconte s'être trouvé

sous les tentes arabes avec des Juifs, voyageurs comme lui; ceux-ci faisaient, devant leurs hôtes, leurs prières accompagnées de mille cérémonies bizarres, sans exciter la plus légère marque de désapprobation ou de dédain. « Si les Arabes paraissaient étonnés d'une chose, ajoute le narrateur, c'était de voir que je n'eusse pas de prières à faire, comme eux et comme les Juifs; et j'avoue qu'humilié de la pensée que cela pouvait leur donner une manvaise idée de moi, et entraîné par l'exemple de ces hommes à fortes convictions, je leur donnai, par quelques signes extérieurs, la preuve que j'avais aussi des croyances et un culte..... >>

La langue arabe est la plus généralement répandue. La langue berbère est parlée chez les Kabayles, tantôt seule, tantôt concurremment avec l'arabe. La langue turque était la langue, officielle. La langue franque, patois mélangé d'italien, de provençal et de quelque peu d'arabe corrompu, est employée pour les communications des indigènes et des Européens sur tout le littoral algérien, aussi bien que sur les autres côtes méditerranéennes occupées par les musulmans. Depuis la conquête, la langue française a pris domicile dans la régence.

Située dans la plus chaude moitié de la zone tempérée, mais encore loin du tropique, l'Algérie doit à cette heureuse position, ainsi qu'à l'élévation du sol et au voisinage de la mer, un climat doux et salubre, surtout sur les pentes boréales de l'Atlas. Il est rare que, pendant l'hiver, le thermomètre descende au-dessous de +10°, et si dans l'été il atteint de 26° à 32°, des vents frais et des brises de mer viennent modérer cette haute température. Les saisons se succèdent régulièrement : d'avril en octobre, le ciel est constamment pur, puis viennent les pluies qui durent jusqu'en mars. Les vents les plus communs sont ceux du nord et du nord-ouest; ce dernier, pendant l'hiver, cause de violentes tempêtes. Le vent du sud, simoun des Arabes, souffle trois ou quatre fois par mois, et amène une chaleur accablante; il est rare, heureusement, qu'il dure plus de vingt-quatre heures. Cependant, sur un assez grand nombre de points du pays, des causes locales d'insalubrité viennent contre-balancer d'une manière fâcheuse les avantages du climat : les environs de Bone, la partie septentrionale de la Mitidja, entre autres, sont couverts de marais d'eau salée, où se renouvelle sans cesse le germe de ces terribles fièvres intermittentes pernicieuses, qui, chaque année, font de nombreuses victimes, et déterminent, par l'encombrement des hôpitanx, des épidémies de typhus et de dyssenterie, cent fois plus redoutables que le fusil ou le yatagan des Arabes. Il faut ajouter que les soldats sont fatigués par des expéditions répétées, et qu'aux privations

qu'ils éprouvent quand ils sont en campagne, ils font succéder des excès de tout genre, à leur retour dans les cantonnements. Il est probable, néanmoins, qu'on pourrait porter remède à tous ces maux; l'expédition française en Morée, contrée qui présente une analogie complète de climat avec l'Algérie, fournit un exemple frappant de ce que peuvent une bonne administration et des soins hygiéniques bien entendus. Pendant les six premiers mois de l'occupation, l'armée, forte de 12,000 hommes environ, en perdit douze cents, par suite des fièvres intermittentes produites par les marais de Navarin et de Patras; des régiments entiers furent réduits à la moitié de leur effectif. Au mois d'avril 1829, une partie de l'armée rentra en France, laissant dans le pays une brigade de 4,000 hommes sous le commandement du général Schneider. Le premier soin du commandant en chef fut de don. ner des ordres pour caserner les troupes, pour améliorer leur régime alimentaire, pour modifier leur service d'après les exigences du climat, etc., etc. Les plus heureux effets résultèrent de cette sollicitude éclairée : non-seulement la mortalité diminua, mais elle devint inférieure à celle qu'on observe dans les contrées les plus favorisées de notre pays. Le nombre des malades s'abaissa même à une proportion si minime, qu'au moment de l'embarquement de la brigade pour rentrer en France, en 1833, elle ne laissa qu'un malade dans les hôpitaux; et cependant les deux dernières années de l'occupation n'avaient point été sans orages; le pays était, pour ainsi dire, en révo lution, et l'armée, réduite à 3,000 hommes, dut occuper les points les plus éloignés du Péloponèse, et traversa, par conséquent, la presqu'île dans tous les sens, et par toutes les saisons.

Quoique le 'sol de l'Algérie soit varié, les terres dominantes sont légères et ferrugineuses; on s'en aperçoit à leur teinte rougeâtre. Quand elles ne sont pas cultivées, elles se couvrent de buissons, de lentisques, de myrtes et de palmiers nains, dont les détritus forment une couche épaisse d'humus qui déguise la nature du fond. Dans les plaines, les terres sont tantôt noires et fortes, tantôt plus légèmais presque toujours fertiles.

res,

Les roches qui composent les montagnes n'ont été étudiées que sur quelques points peu éloignés du littoral; il est probable que le gra nit forme l'arête principale du grand Atlas. Les schistes, les calcaires anciens, les calcaires grossiers, des marnes bleues et blanchâtres, des sables plus ou moins ferrugineux, se rencontrent dans les différentes montagnes, dans les différents terrains, suivant l'époque de leur formation. Des roches volcaniques ont été observées dans différentes localités. Le sel,

dont l'abondance se révèle par les nombreuses sources qui en tiennent en dissolution, se trouve en roches d'un gris bleuâtre, au Gebelel-Malehh (montagne de sel), à trois jouruées de Bône, et dans d'autres localités. On trouve dans les montagnes quelques gemmes, et même des diamants. Ce fait, avancé par Pline, puis révoqué en doute, a été confirmé depuis quelques années, puisque plusieurs grandes collections minéralogiques, à Paris, possèdent maintenant des diamants recueillis dans les sables aurifères du Oued-el-Rummel, qui coule à Constantine. D'autres rivières encore sont aurifères; il paraît même que l'or se trouve à l'état natif sur certains points. De riches mines de plomb, de fer, de cuivre même, promettent de fructueuses exploitations à ceux qui voudront sérieusement s'en occuper.

La végétation, aux environs d'Alger, a une vigueur remarquable, due à l'influence d'une douce température et d'eaux abondantes. Les terrains incultes sont couverts de broussailles au milieu desquelles s'élèvent des palmiers, des myrtes, des grenadiers, entremêlés d'oliviers et d'orangers sauvages. Les villes et les villages sont entourés de jardins ornés des plus belles fleurs, et surtout de la rose, cette reine de l'Orient, ainsi que de vergers où les fruits de l'Europe mûrissent à côté de ceux d'Afrique. Les haies, formées d'agaves et de nopals, fournissent aux habitants un fil solide qu'ils emploient en tissus. Au commencement du printemps, les pentes des collines dépourvues de broussailles se couvrent d'une foule de graminées dont la hauteur s'élève souvent à plusieurs pieds, et qui donnent un excellent fourrage. La vigne, cultivée pour le fruit seulement, fournit en abondance d'excellents raisins. Les oliviers acquièrent, aux environs d'Alger, des dimensions énormes, mais, comme ils ne sont point greffés, ils ne portent que de très-petites olives qu'on ne cueille pas; ce n'est guère que dans les vallées de l'Atlas que cet arbre est cultivé et donne de riches récoltes d'huile. Les dattes mûrissent mal sous le climat d'Alger; il faut traverser l'Atlas pour obtenir ce fruit à un état parfait de maturité. Le mûrier est commun, bien qu'on n'élève point de vers à soie.

La culture principale, comme au temps des Romains, est le blé et l'orge; il faut y ajouter le maïs, une sorte de millet, le tabac, et quelques légumes, parmi lesquels les cucurbitacées, telles que les melons, les pastèques, les courges, etc., ont la préférence; la pomme de terre commence à prendre faveur.

Le kermès, petit insecte analogue à la cochenille, est commun dans tout le pays, mais surtout du côté d'Oran; il fournit une belle couleur écarlate. La garance, et le hennè, plante dont les femmes se servent pour colorer leurs che.

veux et leurs ongles, sont aussi l'objet d'une culture assez étendue. Le coton et la canne à suere, naguère cultivés dans la régence, sont à peu près abandonnés. Les habitants rapportent, à ce sujet, qu'un moulin à sucre fut autrefois établi dans le quartier d'Hamma, près d'Alger, mais que l'Angleterre acheta, au prix de 300,000 francs, du dey qui régnait à cette époque, la destruction de cette industrie, dont elle craignait la concurrence pour ses colonies.

Dans les montagnes du petit Atlas, surtout sur le versant boréal, on rencontre des forêts; le pin d'Alep, le cyprès, et différentes espèces de chêne (le liége, le chêne bellote, l'yeuse, etc.) y sont les arbres les plus communs.

Les lions, les panthères et quelques autres carnassiers du genre Felis (chat), sont communs, vers l'Atlas. L'hyène et le chacal y remplacent le loup, qui ne se trouve point en Afrique. Le renard, la genette, l'ichneumon, s'y rencontrent, et l'ours même, dont Cuvier révoquait l'existence, et qui, du reste, y est extrêmement rare. Parmi les rongeurs, on remarque la gerboise, petit animal dont la forme et les allures rappellent celles des sarigues de l'Amérique et des kanguros de la Nouvelle-Hollande. Quelques espèces de singes, le sanglier, la gazelle, complètent la faune sauvage de l'Algérie. Les animaux domestiques sont le cheval, l'âne, le mulet, le chameau, le dromadaire, le bœuf, le mouton et la chèvre. Le chat et le chien trouvent aussi une place sous la tente ou dans le kourbis, mais ce dernier animal, fidèle compagnon de l'homme dans nos contrées, est dédaigné de l'Arabe, qui concentre toutes ses affections sur son cheval.

Les oiseaux sont à peu près ceux de l'Europe méridionale, à l'exception de l'autruche, qui ne se montre cependant qu'aux confins du désert, et de la pintade qui, originaire de Numidie, s'y trouve en abondance, surtout aux environs de Constantine.

Les reptiles y sont communs; quelques ser. pents sont redoutables par leurs morsures; le crapaud atteint quelquefois une taille monstrueuse; le caméléon se rencontre fréquemment.

Parmi les insectes malfaisants, nous citerons les sauterelles, dont les migrations, heureusement assez rares, sont un fléau redoutable; les moustiques, les punaises, les puces qui se multiplient par myriades jusque dans les campagnes; le scorpion, dont la piqûre peut quelquefois causer la mort; la tarentule, plus effrayante que dangereuse. Les mares contiennent une multitude de petites sangsues presque imperceptibles, qui occasionnent souvent de douloureux accidents aux hommes et aux animaux qui vont s'y désaltérer.

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