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Bernis.

Des tapis plus frais et plus verds
Renaiffent dans nos champs arides;
I.a nature efface fes rides;

Tous fes tréfors nous font ouverts;
Et le jardin des Hespérides
Eft l'image de l'Univers.

C'en eft fait, la Vierge célefte,
En découvrant fon front vermeil
Adoucit d'un regard modefte
L'ardeur brûlante du foleil.
Redoutable fils de Latone,
Tu ceffes de bleffer nos yeux;
Vertumne ramene Pomone;
Et mille fruits délicieux

Brillent fur le fein de l'Automne.
O foeur aimable du Printems,
Tu viens acquitter fes promeffes;
Si tes biens font moins éclatans,
Tu n'as point de fauffes richeffes.
Loin de toi le fard de Vénus,
Et le clinquant de l'impofturę ;
Ta main dépouille la Nature
De fes ornemens fuperflus;
L'air négligé dans la parure
Te donne une beauté de plus.
Les fruits plus nombreux que les feuilles
Couronnent les arbres chéris;

Et tous les biens que tu recueilles
Ont moins d'éclat et plus de prix,
Le regne fortuné d'Aftrée
Se renouvelle dans ta cour,
Tu pèfes la nuit et le jour
Dans une balance dorée.
Entouré de rayons heureux
Qui font la richeffe du monde,
Le ciel de la terre amoureux,
Se peint dans le miroir de l'onde.

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Un jour plus doux luit fur nos têtes;
Nos travaux, mêlés de concerts,
Reflemblent aux plus belles fêtes.
La Nature reprend les droits;
Les Dieux defçendent des montagnes;
La Gloire habite les campagnes;
Les Mufes rêvent dans les bois;
Et laffe d'accorder les Rois,
Thémis affife au pied d'un chêne,
Juge les chanfons de Philène,
Et donne aux Bergeres loix.
Les fiers Amans de la Fortune
Ont quitté la chaîne importune
De la faveur et du devoir;
L'art, l'industrie et le fçavoir
Sortent des Villes dépeuplées;
Et l'Abondance vient revoir
Ses richeffes accumulées.
Ton regne paifible et charmant
Fait oublier celui de Flore.
Automne, la terre t'adore,
Et l'Univers eft ton amant.
Belle encore au déclin de l'âge,
Toi feule, ô divine Saifon,
Utile, douce, aimable et fage,
Du plaifir et de la raison.

O que les Mufes font dociles

Dans ces vergers délicieux!
Mes Vers infpirés par les Dieux
Naiflent plus doux et plus faciles;
Lart de la rime n'eft qu'un jeu;
Lexpreffion fuit la pensée;
Et mon ame au Ciel élancée
Vole fur des aîles de feu.
Dans cette aimable folitude
L'efprit captif fort de prison;
Le plaifir abrége l'étude;
Tous deux étendent la raifon.

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Bernis. Erreur, que l'orgueil déifie,
Préjugés, tyrans des Mortels,
Cédez à la Philofophie

Qui vient de briler vos autels.
Cieux inconnus au télescope;
Et vous, atômes échappés
A l'oeil perçant du microscope,
Vos mysteres développés
Brillent aux yeux de Calliope.
La Vérité, fille du Tems,
Déchire le voile des fables;
Je vois des mondes innombrables;
Le feu lui-même eft habité;
L'air dans fes ondes fi fluides,
Découvre à mon oeil enchanté
Ses Tritons et fes Néréides.
La lumière, dont les couleurs
Forment la parure du monde,
Renferme la race féconde
D'un peuple couronné de fleurs.
La nature anime les marbres;
L'air, le feu, la terre et les eaux,
Les fruits, qui font plier nos arbres,
Sont autant de mondes nouveaux.
Tout agit, rien n'est inutile;
Et la reine des animaux
Unit par différens anneaux
-L'homme fuperbe et le reptile.
Fiers amans de la liberté,
Les êtres l'un de l'autre efclaves,
Ignorent leur captivité

Et méconnoiffent leurs entraves.
Tout cède à la commune loi.
Terre orgueilleuse et téméraire,
Apprends que l'astre qui l'éclaire
Se doit au monde comme à toi.
Obéis, remplis ta carriere,
Adore la fource premiere

Des beaux jours qui te font donnés;
Reçois et repands la lumiere

Sur

Sur d'autres globes fortunes.

Ainfi mon efprit fe dégage

Des erreurs du peuple et des Grands;

Malgré la vanité des rangs,
Tous les êtres font pour le Sage
Moins inégaux que différens.
Ainfi ma Mufe f'abandonne
A fon caprice renaissant:
Et tandis qu'un Dieu careffant,
D'un double myrte la couronne,
Le foleil moins éblouiffant
Abrége les jours de l'Automne.
Pomone avant que de périr
Semble redoubler fes carefles;
Les arbres chargés de richefles
Se courbent pour nous les offrir.
Laffe de ramper fur nos treilles,
La vigne éleve ses rameaux,
Et fufpend fes grappes vermeilles
Au front fuperbe des ormeaux.
Ces fruits fi funeftes aux Perfes,
Et fi délicieux pour nous,
Confondant leurs couleurs diverfes,
Forment les accords les plus doux.
Toutes les ronces font couvertes
De coings dorés et de pavis,
Mille grenades entr'ouvertes
Sement la terre de rubis.

Orange douce et parfumée,
Limons et poncirs faftueux;
Et vous, cédras voluptueux,
Couronnez l'Automne charmée.
Raifins brillans, dont la fraicheur
Etanche la foif qui nous preffe;
Pommes, dont l'aimable rougeur
Reffemble au teint de la jeuneffe,
Tombez et renaiffez fans ceffe
Sur le chemin du voyageur.
L'Amour que l'Automne rapelle,
Defcend du Ciel dans nos vergers,

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Bernis.

Et vient offrir à la plus belle
Les pommes d'or des orangers.
Accourez, Nayades timides,
Le fruit fur la terre tombé
Brille, f'éléve en pyramides,
Et remplit le tréfor d'Hébé.
Nymphes, enlevez vos corbeilles,
Allez offrir au Dieu des eaux
La pourpre qui couvre nos treilles;
L'ambre qui pare nos côteaux.
Un fecond Printems vient d'éclore;
Le Ciel repand de rayons d'or;
L'amaranthe et le tricolor
Rappellent le regne de Flore;
Et la campagne brille encor
Des douces couleurs de l'Aurore.
Helper commence à rayonner;
Jo mugit dans les villages;
Et les Pafteurs vont ramener
Leurs troupeaux loin des pâturages.
Le foleil tombe et f'affoiblit;
Montons fur ces rochers fauvages;
Allons revoir ces payfagés
Que l'ombre du foir embellit!
Jci des champs où la culture
Etale les heureux travaux;
Une fource briliante et pure,
Qui par la fraîcheur de fes eaux
Rajeunit la fombre verdure

Des près, des bois et des côteaux:
Là, des jardins, et des berceaux
Où régnent l'art et l'imposture;
Des tours des fléches, des creneaux,
Des donjons d'antique ftructure;
Sur le chemin de ces hameaux,
De longues chaînes de troupeaux,
Un pont détruit, une masure;
Plus loin, des villes, des châteaux
Couverts d'une vapeur obfcure;
Le jour qui fuit, l'air qui f'épure,

Le

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